Mercredi 10 février, dans une interview au Paris-Normandie, Hervé Morin fait notamment le point sur la réunification de la Normandie, défendue dans le programme des régionales par la majorité présidentielle.
Bruno Le Maire a promis de réunifier la Normandie avant 2014. Doit-on comprendre : seulement s’il est élu président de région ? Ou bien: cela se fera de toute façon ?
Il y a deux options: la première est d’organiser un référendum, avec le risque que les gens ne répondent à la question posée. La seconde, comme le propose Bruno Le Maire, c’est l’élection en Haute et Basse-Normandie de deux présidents issus de notre majorité. Cela permettra de faire la réunification par la volonté des collectivités territoriales.
Le président de la République pourrait prendre une initiative sur ce thème en cette période de campagne électorale ?
Le président a toujours dit qu’il était favorable à la réunification, mais il n’y a pas, à ma connaissance, d’annonce prévue en ce moment sur cette question.
En période de crise, est-ce le bon moment pour mettre en avant cette perspective ? N’est-ce pas un peu décalé.
Cela n’a pas de sens de rester dans une région coupée en deux. Nous avons besoin d’une région puissante, d’une Grande Normandie capable de porter de grands projets d’investissements et de disposer d’une capacité d’influence au niveau national et européen.
Quel l’axe principal sur lequel pèse le Nouveau Centre dans le programme conduit par Bruno Le Maire?
Notre projet est l’aboutissement d’un long travail d’écoute et de réflexion que le Nouveau Centre a mené conjointement avec l’UMP. Nous voulons donner la priorité à l’emploi et investir pour l’avenir en misant sur les secteurs de la croissance verte respectueux de l’environnement. Notre projet s’attache aussi à améliorer la vie quotidienne des gens en comblant les fractures territoriales, en particulier en matière d’accès à la santé ou de réseaux de transports.
Que reprochez-vous à l’institution régionale, au moment où vous vous apprêtez à réformer les collectivités territoriales ?
Je trouve désolant les débats au conseil régional où l’on cherche à tout prix à reproduire ceux de l’Assemblée nationale, avec ses querelles politiciennes systématiques et stériles. Ce que je voudrais c’est que l’on puisse traiter les questions régionales comme un conseil municipal de commune modeste traite des affaires locales. Lorsqu’il s’agit de discuter du développement du réseau ferroviaire, ou de développement économique, il n’y a pas de raison de ne pas pouvoir réfléchir et travailler ensemble.
Comment vous la percevez aujourd’hui cette région Haute-Normandie ?
C’est une région qui a très mal réussi sa reconversion industrielle. Elle a malheureusement raté en partie le développement du tertiaire, des nouvelles technologies. Cette région, dont les indicateurs sont tous passés au rouge, devient de plus en plus un satellite de la région parisienne, d’où le départ de ses jeunes. C’est pourtant une région dont le potentiel est colossal…
Le taux chômage élevé dans la région fait partie des thèmes de la bataille régionale. C’est pourtant un fait national, non ?
Qu’il y ait une dimension nationale, c’est évident. Mais je reste persuadé que la région n’a pas su mettre en place les outils et les politiques qui permettraient de limiter la casse.
Vous vilipendez ce qu’Alain Le Vern appelle sa bonne gestion. Pourquoi bien gérer serait un handicap majeur comme vous le pensez ?
Une collectivité locale c’est fait pour investir et développer des projets porteurs. Un président de région n’est pas là pour faire de la petite épargne. Dans ce cas, pourquoi ne baisse-t-il pas les impôts ? Pour avancer, il ne faut pas avoir peur d’investir.
Quel message envoyez-vous aux électeurs ?
Je veux dire aux électeurs de la majorité que la France a vécu 25 ans de déclin, 25 ans d’immobilisme, et que les réformes que ce gouvernement a lancées porteront leurs fruits, mais il faut seulement un peu de patience…
Que répondez-vous au slogan de vos adversaires : "Nous ne laisserons pas Sarkozy détruire la région comme il détruit la France ?"
Si Monsieur Le Vern était un leader, si c’était lui qui portait le souffle de cette région cela se saurait. Est-ce rassurant qu’après 12 ans de mandat il continue à n’être connu que par un habitant sur quatre ?
Que feriez-vous en priorité si vous étiez aujourd’hui à la présidence de la région ?
Je ferais en sorte que la région porte une structure d’observation, d’anticipation et de réponses aux risques industriels. Si j’étais président de région je mettrais en place une petite structure de missions, qui aurait pour objectif d’anticiper les situations difficiles des entreprises, de regarder par tous les moyens possibles comment on peut sortir ces entreprises de leurs difficultés. Si par malheur il n’était pas possible d’éviter la fermeture il faudrait que la région participe massivement à la reconversion du site. Voilà un exemple… Mais aujourd’hui à la région ils n’ont pas d’idée, c’en est navrant…
Le Grand Paris voulu par le président de la République ? Gadget ou espoir ?
Le problème du grand Paris c’est qu’il renvoie à la question suivante : la région Haute-Normandie est-elle assez puissante, assez influente, pour se développer à la hauteur de ses potentiels ? En réalité, ce n’est pas le Grand Paris qui est un problème, mais la petite Haute-Normandie !
Bayrou était à Rouen il y a quelques jours. Bayrou et vous c’est vraiment fini, fini ?
Oui…Je n’ai pas pour vocation de passer des accords avec le PS au second tour ! L’attitude du Modem est triste. Il n’est même pas crédité de 5 %…
Passées les régionales, il sera vite question des présidentielles de 2012. Vous souhaitez que votre parti y présente un candidat. Donc vous ?
Ce que je veux c’est reconstruire l’UDF, ce courant de pensée de la droite modérée qui a toujours été représenté dans le pays et qui, pour cette raison doit être présent à l’élection présidentielle.
Dans ce cas, vous défendrez des idées autres que celle de Nicolas Sarkozy ?
Le Nouveau Centre c’est le centre et le centre-droit. Il défend dans la vie politique française un idéal européen, un humanisme moderne et une société progressiste. Il y a toujours eu un candidat incarnant cette sensibilité à l’élection présidentielle.
Propos recueillis par Jean-Pierre Boulais